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Article d'opinion

16 Jul 2015

Auteur:
Emmanuel Umpula Nkumba, AFREWATCH (Rép. dém. du Congo)

Les Etats doivent saisir l'opportunité offerte par les Principes directeurs pour renforcer leur législation

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Business & Human Rights Resource Centre

Disponible en anglais

Emmanuel Umpula Nkumba est le Directeur exécutif d’AFREWATCH, une ONG de République démocratique du Congo créée en décembre 2013 qui milite pour une exploitation justice et équitable des ressources naturelles en Afrique, en rendant les entreprises et les Etats responsables.

Quelles sont les voies de recours juridiques et les outils dont vous disposez pour tenir les entreprises pour responsables des violations des droits de l’homme ? Quelles sont les lacunes les plus importantes ?

En République démocratique du Congo (Rép. dém. du Congo), nous disposons de lois internes notamment la Constitution, le Code Minier et ses mesures d’application. Le pays a aussi ratifié un certain nombre de conventions au niveau régional ou international, comme la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, le Pacte international relatif aux droits civils et le Pacte International relatif aux Droits Economiques Sociaux et Culturels.

Les voies des recours : il en existe deux, les voies de recours ordinaires et extraordinaires.

Les voies de recours ordinaires. Il s’agit des Cours et Tribunaux nationaux. Il existe cependant un dysfonctionnement général du système judiciaire dans le pays. L’accès à la justice est difficile pour plusieurs raisons. Premièrement, les victimes ignorent leurs droits et il leur est donc difficile de les revendiquer. Deuxièmement, les juges ne considèrent pas les codes miniers comme faisant partie des instruments qu’ils peuvent utiliser, et ignorent les questions relatives aux ressources naturelles. Finalement, la question d’assistance judiciaire gratuite qui ne fonctionnement pas bien, ainsi que les procédures judicaires trop longues et les frais énormes qu’elles engendrent sont aussi problématiques.

Il existe aussi les recours extraordinaires au niveau de la Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples pour n’en citer qu’un. Les résolutions de la Commission ne sont cependant pas contraignantes pour les Etats. Il faut avoir épuisé les voies de recours internes pour pouvoir saisir ce mécanisme et cela prend du temps, environ un an pour obtenir une recommandation. C’est également onéreux pour les victimes.

Pour les Points de contact nationaux de l’OCDE, la critique est la même que pour la Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples. Même si les voies de recours internes n’ont pas besoin d’être épuisées, les résultats sont des recommandations, ce qui est assez faible pour arriver à un résultat satisfaisant pour les victimes.

Il existe aussi les mécanismes de recours de la Banque mondiale, mais dans ce cas, il faut déjà s’assurer qu’il y ait un investissement de la part de cette institution. On fait encore face au problème des coûts pour accéder ce mécanisme et les résultats ne sont pas satisfaisants dans beaucoup de cas.

Concernant les mécanismes de plainte internes des entreprises, ils varient d’une entreprise à l’autre, mais dans les affaires que nous avons traitées, les victimes n’ont pas été entendues et n’ont pas obtenu gain de cause.

Les principes volontaires comme les Principes Directeurs des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l’homme (Principes directeurs) et les Principes de l’Equateur ont leurs limites car ils ne sont pas contraignants et ne font pas allusion à toute la documentation existante en matière de droits de l’homme.

Nous avons la foi et utilisons les mécanismes pour continuer le combat, pour qu’au niveau international il y ait un traité contraignant. Mais dans les pays à faible gouvernance, l’Etat doit avoir des mécanismes judiciaires compétents.

Quelles difficultés (juridiques ou pratiques) rencontrez-vous pour tenir les entreprises responsables en République démocratique du Congo ? Pensez-vous que des progrès ont été faits dans ce domaine dans votre pays ?

Dans beaucoup de cas. Il y a des conflits d’intérêt. Les autorités au niveau national détiennent des parts dans les entreprises ou jouent un rôle de protecteur des entreprises. En contrepartie, les autorités tirent un intérêt personnel des entreprises.

L’accès aux informations s’avère difficile. Il n’y a pas de loi clairement établie qui oblige la diffusion des informations des entreprises.

En tant qu'ONG, l’accès à la justice contre une entreprise qui a violé les droits de l’homme est difficile. En l’état actuel des choses, l’ONG ne peut pas intervenir en justice, car n’ayant pas d’intérêt et n’étant pas partie au procès. Mais cependant, on peut noter une progression dans le domaine de la forêt, la loi actuelle reconnaît aux ONG le pouvoir d’aller en justice en cas de violation flagrante des droits des communautés ; nous espérons que le Code Minier en cours de révision, va prendre en compte cette avancée.

Même les victimes qui vivent dans des communautés autour d’une entreprise ne peuvent pas aller en justice car elles n’ont pas la personnalité juridique. Il n’existe pas de possibilité d’action collective. Dans les cas dans lesquels nous travaillons, nous avons mené une action en justice pour chaque victime.

Les frais de justice sont supportés par les justiciables. L’Etat ne donne pas assez des moyens financiers aux tribunaux pour fonctionner. Par conséquent, la personne qui vient demander justice doit prendre les frais à sa charge. La corruption et la loi du plus fort empêchent l’accès des pauvres à la justice.

Des réformes peuvent être faites par l’Etat pour améliorer les choses. Les lois datent de l’époque coloniale et ne sont plus adaptées à la situation actuelle, aux besoins de la société et aux problèmes que nous avons. Il est important d’avoir un instrument contraignant et d’harmoniser les différentes initiatives au niveau régional et international. Sinon, les entreprises vont aller dans un autre pays qui ne demande pas de comptes sur les droits de l’homme.

L’augmentation des frais de fonctionnement de la justice doit être réglée au niveau interne si l’Etat fait de la justice sa priorité.

Ce qui nous donne le courage de continuer, c’est que maintenant, nous pouvons discuter des questions des entreprises et les droits de l’homme. Cela n’était pas le cas, il y a quelques années.

Quelles sont les conséquences ou les répercussions auxquelles vous avez fait face en raison de votre travail de défense des droits de l’homme ?

Les menaces ne manquent pas : intimidations, atteintes à l’intégrité physique, arrestations. J’ai déjà fait l’objet de menaces plusieurs fois. Pour réduire ces risques, il est important de rendre professionnel le travail de défense et de promotion des droits de l’homme. Mais aussi de travailler en réseau, avec de partenaires au niveau national et international.

En tant qu’ONG de défense des droits de l’homme, nous faisons aussi face aux menaces de manque de ressources pour faire notre travail.

Les moyens financiers pour faire aboutir les cas sur lesquels nous travaillons et le renforcement des capacités sont vraiment un handicap.

Collaborez-vous avec des avocats d’autres pays ? Si oui, de quelle façon ?

Nous nous retrouvons dans les fora régionaux et internationaux.

Nous n’avons pas encore développé la possibilité de travailler ensemble mais cela est lié aux moyens limités à notre disposition en termes de moyens de communication (téléphone, internet), de matériels et d’infrastructure.

A l’avenir, nous espérons travailler avec des collègues étrangers pour échanger nos expériences et apprendre les uns des autres.

Qu’est-ce que la communauté internationale peut faire pour aider ?

Elle aide par l’intermédiaire de l’ONU par exemple mais ce n’est pas encore assez.

Les Principes directeurs ont suscité un débat. Il faut les améliorer et l’existence d’un groupe qui réfléchit à la manière de les renforcer est un bon début.

Souvent, il n’y a pas de respect des droits de l’homme car les entreprises sont plus puissantes que les Etats. Les gens qui arrivent au pouvoir y arrivent par la force des multinationales et leurs sont redevables. Les personnes qui ont essayé de s’opposer à ces pratiques sont chassées du pouvoir. Même si nous avons des lois nationales et internationales pour protéger les droits de l’homme, la question de la démocratie doit être abordée. Les droits de l’homme continueront à être violés car les personnes au pouvoir, en Afrique de manière générale, n’ont rien à faire avec les peuples. Les intérêts économiques priment sur les autres intérêts. Certains Etats occidentaux doivent comprendre que le changement politique dans une démocratie, renforce les affaires qu’il ne les déstabilise.

Quel serait votre message principal au monde des affaires au sujet de la responsabilité en cas de d’atteintes aux droits de l’homme ?

Nous demandons aux entreprises de respecter les droits de l’homme dans les pays où l’Etat est faible.

Quand une entreprise viole les droits de l’homme, nous demandons réparations aux victimes pour les dommages causés plutôt que d’entamer de longues procédures judiciaires, et cela leur reviendrait moins cher. C’est l’esprit des Principes directeurs.

Les Etats devraient profiter de cette évolution au niveau international pour renforcer leur législation. L’équilibre entre le profit et les droits de l’homme est essentiel.