Dix ans après le drame du Rana Plaza : Les ONG réclament toujours de réelles contraintes légales
"Dix ans après le drame du Rana Plaza, la fast-fashion toujours coupable", 24 avril 2023
Un long bâtiment écroulé, des corps inanimés et poussiéreux, des mutilés à vie : le 24 avril 2013, l'effondrement d’un bâtiment de huit étages à Savar, à l'ouest de Dacca au Bangladesh, faisait 1 138 morts et plus de 2 000 blessés.
Le Rana Plaza abritait des usines de confection de vêtements pour diverses grandes marques d'habillement occidentales, comme Mango, Benetton, Walmart, Auchan, C&A ou Carrefour...
...Si dix longues années se sont écoulées, le traumatisme de la tragédie est toujours présent pour les survivants et les familles des victimes. Plus de 2 000 personnes sont sorties vivantes de la catastrophe, mais elles sont nombreuses à souffrir de séquelles physiques et psychologiques profondes...
...Selon une étude d'ActionAid Bangladesh, près de 55 % des survivants sont actuellement sans emploi.
...Un tribunal du Bangladesh a inculpé 38 personnes pour meurtre, dont Sohel Rana, propriétaire de l’immeuble Rana Plaza et influent homme politique du parti au pouvoir...Les directeurs, les propriétaires des ateliers et le propriétaire de l'immeuble sont jugés pour avoir "forcé" leurs employés, pour la plupart des femmes, à travailler au Rana Plaza alors que l'immeuble présentait un danger évident avant le drame...
...Le procès est si bien enlisé qu’il ne faut pas s'attendre à un verdict avant plusieurs années.
L'ampleur de la catastrophe du Rana Plaza a suscité un tollé mondial. Sous la pression internationale, les multinationales de l’habillement ont été poussées à signer, un mois après le drame, un accord contraignant avec les syndicats bangladais sur les normes de sécurité des usines du pays.
Conçu sous l'égide de l'Organisation internationale du travail..., l’"accord Bangladesh" a contraint 175 signataires...à payer pour les réparations des usines de leurs sous-traitants ainsi qu’à financer un système indépendant d'inspection des usines.
Il a permis de mettre aux normes quelque 1 820 usines de confection..., et de réaliser plus de 30 000 inspections, couvrant ainsi plus de deux millions d’ouvriers du textile bangladais...
Mais l'"accord Bangladesh" a ses limites : certains grands groupes présents au Bangladesh n'ont pas signé l’accord sur les normes de sécurité, parmi lesquels Walmart, mais aussi les géants Ikea, Amazon, Levi's ou encore le groupe français Auchan. La moitié des usines ne sont pas couvertes.
Par ailleurs, l’accord doit être renouvelé tous les trois ans. Et depuis trois ans, sa structure a changé : "Le conseil d’administration n’est plus égalitaire : il y a douze membres pour les industriels contre six pour les syndicats"...
...De nombreuses ONG ont, depuis..., dénoncé l’absence de responsabilité juridique des multinationales envers les employés de leurs filiales ou de leurs sous-traitants à l'étranger en matière de droits humains...
...En France, la catastrophe du Rana Plaza a donné lieu à une législation pionnière sur la question. En mars 2017, la loi sur le "devoir de vigilance"...vise à sanctionner les multinationales lors de manquements de leurs filiales ou sous-traitants...
...l'Union européenne planche sur une législation s’inspirant du modèle français. Le projet de loi viserait les atteintes aux droits humains et sociaux, mais aussi les dommages environnementaux des entreprises européennes dans leur chaîne de production...