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Article d'opinion

25 Jui 2019

Auteur:
25/6/19 - Maysa Zorob & Antonella Angelini, Business & Human Rights Resource Centre ,
Auteur:
Maysa Zorob et Antonella Angelini, Centre de Ressources sur les Entreprises et les Droits de l'Homme,
Auteur:
Maysa Zorob & Antonella Angelini, Centro de Información sobre Empresas y Derechos Humanos

Les actionnaires sont-ils les nouveaux chefs de file pour la justice climatique?

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Ce blog a été d'abord publié en anglais sur le blog du Business and Human Rights Journal ici.

Pendant des décennies, les individus et communautés affectés par le changement climatique - de même que les avocats, militants et organisations de la société civile qui les représentent - ont usé du contentieux comme outil stratégique pour tenir les entreprises responsables des atteintes aux droits de l'homme liées au changement climatique. Par le passé, ces procès étaient intentés contre les gouvernements. Cependant, et comme l'a démontré notre Bulletin Annuel 2018, La température monte: Responsabilité juridique des entreprises en matière de changement climatique, les entreprises sont de plus en plus la cible directe de poursuites judiciaires.

Mieux, les " suspects habituels" ne sont plus les seuls catalyseurs des actions. De plus en plus, les actionnaires institutionnels et privés intentent des actions en justice contre des entreprises ou institutions privées dans lesquelles ils possèdent des actions (dénommées litige initié par les actionnaires). Par conséquent, les actionnaires apparaissent comme un important groupe d'activistes dans la lutte contre l'impunité des entreprises pour les préjudices sur le climat (voir notre dernière note sur le contentieux climatique pour plus de détails).

Le premier procès au monde porté par un actionnaire au motif d'une défaillance alléguée dans la prise en charge adéquate du risque climatique fut intenté contre l'entreprise Exxon Mobil (Exxon) en 2016. Ce recours collectif a été lancé par un groupe d'investisseurs américains qui a demandé le paiement de dommages à Exxon après l'effondrement du cours de l'action de 13% cette année-là. Les demandeurs ont allégué que l'entreprise avait fait des déclarations fausses et trompeuses sur l'impact du changement climatique sur son activité, en surestimant de manière significative la valeur de ses réserves en pétrole, et en gonflant artificiellement la valeur de l'entreprise. Même si l'affaire a été rejetée, elle a ouvert la voie à ce qui semble être une vive tendance au recours collectif fédéral aux Etats-Unis.

Au moins deux de ces nouvelles affaires ont été lancées auprès de tribunaux fédéraux de Californie depuis la fin de 2018, lorsque des actionnaires ont réclamé une indemnisation monétaire pour des dommages allégués qu'ils ont subis suite à des déclarations fausses et trompeuses sur les impacts du changement climatique. Barnes v. Edison International, par exemple, est un procès pour fraude alléguant que l'entreprise a fourni des informations trompeuses sur les mesures d'atténuation qu'elle a prises liées au changement climatique et au risque surélevé de feux de forêt en Californie. Dans l'affaire York County v. Rambo, une coalition de fonds de pension et d'investisseurs ont poursuivi l'entreprise Pacific Gas and Electric Company et sa maison-mère (PG&E). Dans ce procès, il est prétendu que la valeur des obligations a baissé suite à l'incapacité des défendeurs à divulguer la situation réelle de leur activité et opérations et des risques posés par leurs pratiques de sécurité laxistes contre les feux de forêt.

Un recours aux poursuites est fait pour faire appliquer d'autres droits fiduciaires et procéduriers. En juillet 2018, Mark McVeigh a intenté pour la première fois un procès contre l'administrateur de son fonds de retraite, le Retail Employees Superannuation Trust (REST). Le demandeur allègue que REST a violé les droits fiduciaires qui lui sont dus en ne prenant pas en compte de manière adéquate les risques de changement climatique. Par conséquent, il exige de REST la mise à disposition d'informations et tente d'obtenir des injonctions du tribunal pour prévenir une future inconduite du défendeur.

De manière similaire, en octobre 2018, Client Earth une organisation environnementale caritative et actionnaire dans la société énergétique polonaise Enea SA, a intenté un procès contre l'entreprise auprès du Tribunal régional de Poznań en Pologne. Selon les arguments de l'acte d'accusation, en raison de risques financiers liés au climat, l'approbation d'Enea pour la construction d'une centrale électrique à charbon porte préjudice aux intérêts de l'entreprise et de ses actionnaires et devrait être retirée.Ce type de procès vise à changer la stratégie climatique des entreprises productrices de combustible fossile, en les forçant à abandonner les investissements sujets à controverse.

Un autre exemple emblématique de litige initié par des actionnaires est l'affaire Fentress v. Exxon Mobil Corp. Ce recours collectif qui vient d'être rejeté fut intenté contre l'entreprise par ses employés qui ont participé au Plan d'épargne d'Exxon Mobil et qui avaient investi dans les actions d'Exxon. La plainte alléguait que la non-divulgation par l'entreprise d'informations sur le changement climatique constituait une violation des droits fiduciaires au titre de l’Employee Retirement Income Security Act (Loi sur la sécurité des revenus de retraite des salariés) - ERISA. Les demandeurs soutenaient qu'il y avait une surestimation artificielle de la valeur de l'action d'Exxon en raison d'une fraude et de fausses déclarations, faisant ainsi de l'action d'Exxon un investissement imprudent au titre de l'ERISA et portant préjudice au Plan ainsi qu'à ses participants ayant acquis ou détenu des actions d'Exxon.

Comme le démontrent ces procès, les actionnaires apparaissent de plus en plus comme des acteurs importants dans les initiatives à l'échelle mondiale pour parvenir à des politiques et pratiques d’entreprises responsables. Contrairement aux procès stratégiques qui représentent une tentative d’attribuer la responsabilité du changement climatique à des entreprises spécifiques, le litige initié par les actionnaires repose essentiellement sur l’évaluation des risques financiers liés au changement climatique. En tant que plaignants, les actionnaires ont généralement invoqué l'un des deux arguments suivants: que leur manque de connaissances sur les risques climatiques sape leur capacité à exercer leurs droits en tant qu'actionnaires, et/ou que l'utilisation trompeuse par l'entreprise de connaissances porte atteinte à leurs intérêts en tant qu'actionnaires. Les informations climatiques sont essentielles aux deux arguments avancés. Le litige initié par des actionnaires est aussi intéressant en termes de recours recherchés par les demandeurs. L'éventail est large, variant entre l'indemnisation et la restitution monétaire, en passant par l'exécution d'obligations sur la divulgation climatique et les jugements déclaratoires pour violation des droits à l'information, à des tentatives plus ambitieuses de changer la stratégie commerciale des entreprises productrices de combustible fossile.  

Plusieurs procès sont en cours, mais les stratégies juridiques innovantes sur lesquelles ils sont fondés ne résistent pas encore à l'épreuve du temps. Pendant ce temps, les entreprises ne peuvent plus ignorer les demandes pressantes - y compris par leurs propres actionnaires - pour qu'elles s'attaquent, atténuent et divulguent leurs impacts sur le climat.