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Au cours de la décennie écoulée, les défenseurs des droits de l’homme (DDH) se sont mobilisés avec courage pour mettre fin aux abus commis par les entreprises et prévenir les préjudices que celles-ci causent, en dénonçant les violations des droits de l'homme et de l’environnement, en exigeant la responsabilité, et en plaidant pour des pratiques économiques respectueuses des droits. Des Peuples autochtones qui protègent les forêts contre les activités minières aux journalistes qui dénoncent les risques sur la santé et l’environnement liés à l’exploitation forestière, aux travailleurs qui plaident pour de meilleures conditions dans l’industrie textile, les DDH sont en première ligne pour l'avènement d’un monde d’abondance, plus équitable et plus durable où les droits sont protégés, les peuples ainsi que la nature s’épanouissent, et où les économies justes peuvent prospérer.
Chacun de nous a le droit d’agir pour protéger nos droits et notre environnement, et contribuer à créer un monde plus juste et équitable. Pourtant, ceux qui le font prennent souvent un risque considérable. Il est de la responsabilité des entreprises de respecter les droits de l’homme, y compris ceux des personnes qui agissent afin de défendre les droits de l’homme. Lorsque des entreprises ne prêtent pas l’oreille aux DDH, elles perdent des alliés de poids. Les personnes et organisations qui luttent pour la transparence, la responsabilité et contre la corruption sont tous des acteurs essentiels d’un environnement économique ouvert et stable. Avec la montée de l’autoritarisme, l’impératif d’une transition énergétique juste à l’échelle mondiale, et l’élargissement des inégalités à travers le monde, le rôle des entreprises a rarement été aussi important, d’autant plus que les DDH qui font pression pour des pratiques d’entreprise respectueuses des droits sont confrontés à des défis grandissants.
De janvier 2015 à décembre 2024, le Centre de Ressources sur les Entreprises et les Droits de l’Homme (le Centre de Ressources) a enregistré plus de 6.400 attaques dans 147 pays contre des personnes qui exprimaient des préoccupations par rapport aux risques ou préjudices liés aux entreprises. Approximativement, c’est l’équivalent de deux attaques en moyenne par jour au cours de la dernière décennie. Pour la seule année de 2024, nous avons recensé 660 attaques.
Les principaux constats sont :
- Les attaques perpétrées contre les DDH ont touché presque tous les secteurs d’activité dans toutes les régions du monde.
- L’exploitation minière, l’agro-industrie et les combustibles fossiles ont été les secteurs qui enregistrent le plus grand nombre d’attaques.
- Près des trois quarts des attaques ciblaient des défenseurs du climat, de la terre et de l’environnement. Cela s’accompagne d’une répression sévère contre le droit de manifester par les gouvernements à travers le globe.
- Une attaque sur cinq visait les Peuples autochtones, malgré le fait qu’ils ne représentent que 6% de la population mondiale.
- L’Amérique latine et les Caraïbes et l’Asie et le Pacifique sont de loin les régions les plus dangereuses pour les DDH, ce qui inquiète quant aux préjudices causés par les entreprises, soit près de trois attaques sur quatre enregistrées au total.
- Depuis 2015, il y a eu plus de 530 cas de poursuites-bâillons (SLAPPs) intentées ou initiées par des acteurs privés contre des DDH qui ont soulevé des problèmes concernant les entreprises.
- Le plus grand nombre d’attaques est survenu lorsque des personnes ont exprimé des craintes en ce qui concerne les risques ou préjudices sociaux et environnementaux associés aux grands projets économiques, et que les gouvernements et/ou entreprises ont tenté de museler toute opposition. Parmi les projets associés au plus grand nombre d’attaques au cours de la dernière décennie, on peut citer le projet d’extraction pétrolière et de développement du Lac Albert (qui inclut l’Oléoduc de pétrole brut d’Afrique de l’Est) (Ouganda et Tanzanie), Inversiones los Pinares (Honduras), la mine Las Bambas (Pérou), et l’Oléoduc Dakota Access (États-Unis), l’Oléoduc Ligne 3 (États-Unis et Canada).
- Les attaques contre les DDH et les restrictions sur les libertés civiques nuisent aux affaires. Elles empêchent les entreprises et investisseurs d’accéder à des informations cruciales sur les risques et impacts sur les droits de l’homme, ce qui augmente le risque opérationnel, financier et de réputation.
L’espace civique - l’environnement qui permet à nous tous d’organiser, de participer et de communiquer librement dans nos sociétés, a également continué à se détériorer au cours de la dernière décennie. Selon Civicus, seuls 3.6% de la population mondiale vivent dans des pays ayant un espace civique ouvert, où les citoyens et les organisations de la société civile peuvent organiser, participer et communiquer sans restriction. Dans chaque région, les gouvernements ont abusé de leur pouvoir pour restreindre les libertés civiques des personnes qui plaident pour des pratiques économiques responsables. Les gouvernements emprisonnent des journalistes, font voter des lois restrictives (comme les projets de loi sur le financement extérieur et des lois essentielles relatives aux infrastructures), inculpent et poursuivent en justice les DDH, et font usage de la force violente lors des manifestations, entre autres mesures.
Ceci porte préjudice aux entreprises. Les restrictions de l’espace civique créent un ‘déficit informationnel’ , ainsi, les entreprises et investisseurs manquent de connaissances sur les impacts négatifs réels ou potentiels sur les droits de l’homme, ce qui peut entraîner des risques juridiques, financiers, de réputation et autres. La démocratie et la pleine jouissance des libertés civiques sont essentielles pour relever les défis clés auxquels l’humanité est confrontée et assurer une croissance économique durable. Certains économistes ont découvert que la démocratisation entraîne une augmentation du PIB par tête d’habitant qui varie entre 20% et 25%. En outre, en vertu des Principes Directeurs des Nations Unies relatifs aux Entreprises et aux Droits de l’Homme (PDNU) et orientations subséquentes, les acteurs économiques ont également la responsabilité de respecter les droits de l’homme, ce qui inclut un engagement dans la diligence raisonnable et solide relative aux droits de l’homme qui identifie et atténue les risques sur les libertés civiques et les DDH.
Dans le contexte actuel marqué par une érosion démocratique continue, la dérégulation, une réaction hostile contre toute voix qui exprime des craintes d’ordre environnemental, social et de gouvernance, un conflit accru, et l’instrumentalisation à la fois de la loi et de la technologie contre la défense des droits de l’homme, les DDH nous rappellent qu’il faut transcender la polarisation et persister dans la réalisation d’un avenir plus juste et dans l’abondance pour tous. Les avancées majeures au cours de la dernière décennie incluent un instrument juridiquement contraignant pour protéger les militants écologiques, une réglementation pour réduire les poursuites-bâillons, et les victoires importantes qui ont renforcé la responsabilité des entreprises suite au plaidoyer et aux actions judiciaires. Les représentants des communautés autochtones ont partagé une vision puissante d’une transition énergétique respectueuse des droits – un cadre essentiel pour l’avenir. Ils innovent, parfois avec des entreprises progressistes, pour créer de nouveaux modèles économiques transformateurs conçus pour promouvoir une prospérité partagée en accord avec les priorités autodéterminées des Peuples autochtones.
Entre janvier 2015 et décembre 2024, le Centre de Ressources a documenté plus de 6.400 cas d’attaques à l’échelle mondiale contre les DDH qui dénoncent les préjudices causés par les entreprises. Ces attaques visaient des Peuples autochtones, des leaders de mouvements de jeunes, des personnes âgées, des femmes défenseurs, des journalistes, des militants écologiques, des communautés et des organisations à but non lucratif, ce qui affecte de façon néfaste des dizaines de milliers de personnes.
Ceci n'est que la partie visible de l’iceberg. Notre étude est basée sur des informations accessibles au public, et étant donné la sévérité des restrictions de l’espace civique dans certains pays et les préoccupations d’ordre sécuritaire, plusieurs attaques ne sont pas signalées. De plus, les gouvernements n'assument pas en grande partie leur devoir qui consiste à faire le suivi de ces attaques. Dans les pays et régions où peu de cas d’attaques sont documentés, ceci ne signifie pas que la violence contre les défenseurs n’existe pas, mais plutôt que les informations ne sont pas accessibles. Pour en savoir plus sur notre méthodologie de recherche.
Les restrictions de l’espace civique ont facilité ces attaques. D’autres facteurs comprenaient le faible état de droit et le non-respect d’une gouvernance responsable, les modèles économiques axés sur la maximisation des profits, à travers une extraction non durable des ressources, le racisme et la discrimination, et l’absence de consultation avec les parties prenantes potentiellement affectées.
« J’entends régulièrement des autochtones qui opèrent dans des zones isolées, éloignées ou rurales dire que les entreprises et gouvernements ne les consultent pas de façon appropriée - et que leur droit de donner ou non leur consentement libre, préalable et éclairé sur les activités qui affectent de façon néfaste leurs vies ou leurs territoires fait l’objet soit d’une instrumentalisation, soit il est ignoré. Certaines attaques sont commises par des agents qui sont à la solde des entreprises, d’autres le sont par des autorités gouvernementales et entreprises agissant de concert. » - Mary Lawlor, rapporteur spécial des Nations Unies sur les Défenseurs des Droits de l’Homme.
L’Amérique latine et les Caraïbes, l’Asie et le Pacifique sont de loin les régions les plus dangereuses pour les DDH, ce qui soulève des préoccupations quant aux préjudices causés par les entreprises, soit près de trois attaques sur quatre (71%) au cours de la dernière décennie. L'Afrique suit avec 583 cas d’attaques - dont près du tiers perpétré en Ouganda.
En Amérique latine, la majorité des attaques est concentrée dans six pays qui représentent près de 36% de l’ensemble des attaques dans le monde - Brésil (473), Mexique (455), Honduras (418), Colombie (331), Pérou (300), et Guatemala (256). Malgré le fait qu’il ne représente que 0,1% de la population mondiale, 7,2% des attaques ont eu lieu au Honduras. En Asie, le nombre le plus élevé des attaques est survenu aux Philippines (411), en Inde (385), au Cambodge (279), et en Indonésie (216).
Une autre tendance est la hausse du nombre d’attaques au Royaume-Uni, où 91% des attaques se font sous forme de harcèlement judiciaire (arrestations, accusations criminelles et poursuites-bâillons). Les attaques au Royaume-Uni ont notamment augmenté de 7 en 2022 à 21 en 2023 – la même année où la Loi relative à l’Ordre public du Gouvernement Britannique, qui renforce sensiblement le pouvoir de la police à répondre aux manifestations , est entrée en vigueur, sapant la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association. Les attaques se sont intensifiées en 2024 passant à 34. Presque toutes ces attaques ont été commises contre des personnes qui ont exprimé leurs craintes par rapport au secteur du combustible fossile.
Les attaques ciblent des personnes, des organisations et des communautés, causant des dommages physiques, épuisant les ressources et faisant obstacle au travail des défenseurs des droits de l’homme. Elles peuvent aussi avoir un effet dissuasif sur l’espace civique et affaiblir le tissu social qui est essentiel pour la résistance, la cohésion communautaire, et le maintien d’une société inclusive et pacifique. En plus des dommages sur la sécurité physique, les attaques peuvent aussi affecter de façon néfaste le mental des DDH, et leur bien-être émotionnel et économique.
Depuis 2015, le Centre de Ressources a recensé 5.323 attaques non létales contre les DDH qui s’opposent aux préjudices causés par les entreprises. À travers notre étude et le travail collectif mené avec the ALLIED Coalition, nous avons identifié beaucoup de cas d’escalades et d’attaques cycliques contre des défenseurs des droits dans lesquels les menaces et le harcèlement judiciaire précèdent la violence physique.
Intensification des attaques : l’opposition des peuples Tumandok à un projet de barrage
Le Peuple Tumandok est un groupe autochtone dont les terres ancestrales aux Philippines ont été ciblées pour de nombreux projets d’aménagement public et privé, faisant éclater un conflit continu pour la communauté. Les membres de la communauté se sont opposés avec fermeté au Projet d’Infrastructure Multifonctionnel de la Rivière Jalaur (JRMP) II, qui comprend la construction d’un barrage qui déplacerait des villages autochtones et continuerait sans un consentement Libre, préalable et éclairé. Le marché de construction a été attribué à Daewoo Engineering & Construction Co. Ltd et le projet a bénéficié du soutien de la Banque d’Export-Import de Corée. De nombreuses attaques ont été perpétrées contre des membres de la communauté qui ont exprimé leur opposition à ce projet. Cette violence cyclique contre le Peuple Tumandok se traduit dans les données de Asian NGO Coalition for Agrarian Reform and Rural Development (ANGOC), ALLIED, et d’autres sources.
Nous avons invité la Banque d’Export-Import de Corée et Daewoo E&C à répondre. La réponse intégrale de la Banque d’Export-Import au meurtre de DDH en décembre 2020 est disponible ici. Daewoo E&C n’a pas répondu.
Meurtres et disparitions
Au cours de la dernière décennie, nous avons documenté près de 1.100 meurtres de DDH qui dénonçaient courageusement les préjudices causés par les entreprises. Rien qu’en 2024, nous avons enregistré 52 meurtres.
Nous commémorons les vies, le courage et le travail essentiel de ces DDH et de leurs communautés. Alors que les gouvernements ont un devoir d’enquêter sur ces meurtres, la majorité des attaques – aussi bien létales que celles non létales – ne font pas l’objet d’enquête, ne sont pas punies, ce qui nourrit une culture de l’impunité qui ne fait qu’encourager un regain de violence.
Les militants autochtones courent particulièrement un risque. Près d’un tiers (31%) des personnes tuées étaient des militants autochtones. La plupart des meurtres de militants autochtones sont survenus en Amérique latine, de même qu’aux Philippines.
Nous avons aussi recensé 116 enlèvements et disparitions, qui laissent des familles et communautés désespérées, sans savoir où se trouvent leurs êtres chers ni s’ils sont en sécurité. La plupart sont survenus au Mexique et aux Philippines.
Disparition de deux militants au Mexique
Co-écrit avec Global Rights Advocacy
Le secteur minier est le plus dangereux pour les DDH au Mexique. Au cours de la dernière décennie, un quart des attaques concernait les DDH qui ont soulevé des préoccupations relatives à l’extraction minière : 40% de ces attaques étaient des meurtres. Dans les montagnes côtières de Michoacán, les Peuples autochtones opposent une résistance farouche contre l’extraction minière, dans une atmosphère généralisée de violence. Les Peuples autochtones défendent leurs territoires contre les intérêts privés et le crime organisé, en faisant face aux inculpations, persécutions, agressions et meurtres.
Antonio Díaz Valencia, un dirigeant communautaire autochtone et enseignant, et Ricardo Arturo Lagunes Gasca, un avocat de la communauté de Michoacán Nahua d’Aquila, collaboraient pour protéger la communauté de San Miguel d’Aquila contre les abus allégués de la compagnie minière Ternium. Ternium, constituée au Luxembourg, est une filiale de l’entreprise italo-argentine Technit Group, l’un des plus grands producteurs d’acier en Amérique latine. La communauté de San Miguel d’Aquila a exprimé ses craintes par rapport à l’environnement au regard des opérations de Ternium depuis des années, de même que les avantages minimes que la communauté tire des opérations minières dans la zone.
La communauté Nahua, par la voix de son leader Antonio Díaz Valencia, a affirmé avant les disparitions que l’entreprise n’a pas respecté les accords établis, dont une indemnisation convenue à la communauté.
Elle a aussi prétendu que Ternium fait usage des terres à des fins autres que celles convenues, comme l’exploitation d’une propriété qu’elle avait accepté d’utiliser comme décharge.
« Mon papa est un activiste social depuis toujours. C'est un militant des droits des Peuples autochtones, en particulier du peuple Nahua, auquel il appartient. C’est une personne vénérée et célèbre dans toute la région pour le travail qu’il fait. Bref, il s’est sacrifié pour cette région. C’est ce qu’il aime le plus » - Keivan Diaz Valencia, petit-fils d’Antonio Diaz
Le 15 janvier 2023, après avoir gagné les procès qui auraient permis la tenue d’une élection démocratique des autorités communales et fixé un agenda pour le développement minier, Antonio et Ricardo ont été victimes de disparition forcée. Après avoir participé à une assemblée de la communauté au cours de laquelle ces questions ont été débattues, leur véhicule a été retrouvé, les pneus crevés et portant des impacts de balles. Malgré la collecte de nombreuses pièces à conviction, personne ne sait où se trouvent ces DDH.
Pendant quatre ans, les DDH se sont battus devant les tribunaux pour sauvegarder les droits de la communauté Nahua d’Aquila. Les deux militants ont signalé différents types de menaces, dont des filatures par des personnes armées. Lors d’une assemblée communautaire, en décembre 2022, en présence de dirigeants d’entreprise, les deux DDH auraient reçu des menaces comme quoi ils seraient victimes de disparition forcée s’ils persistaient à s’en prendre à Ternium. Ricardo faisait aussi partie d’un mécanisme de protection gouvernemental en faveur des DDH en raison de son travail de sauvegarde des droits des autochtones. De plus, en décembre 2022, Antonio a adressé une lettre au Président Mexicain d’alors Andrés Manuel López Obrador, accusant Ternium de rémunérer des forces armées pour attaquer et réprimer des membres de la communauté d’Aquila.
Les familles et défenseurs exigent une enquête plus approfondie sur le contexte de violence contre les militants écologiques, et le rôle des forces de sécurité, des autorités étatiques et de l’entreprise Ternium. La violence et les menaces continues contre les témoins, les membres de la famille, et les avocats augmentent les risques, rendant essentielle une action humanitaire urgente.
À cette fin, les familles et leurs représentants ont créé le Mécanisme Indépendant de Rétablissement Humanitaire pour Antonio et Ricardo (MIRHAR), et, à travers la diplomatie multilatérale, ils cherchent à collaborer avec le Luxembourg, les États-Unis et Ternium pour connaître la vérité. Ils exigent aussi que le Mexique réinstalle le groupe de travail de haut niveau convenu pour mettre en œuvre les recommandations du Comité des Nations Unies contre les Disparitions Forcées et de la Commission Inter Américaine des Droits de l’Homme.
Le Centre des Ressources a invité Ternium et Techint Group à répondre aux allégations faites par la communauté et aux disparitions d’Antonio et de Ricardo. Ternium a nié toutes les allégations ; sa réponse complète est disponible ici. Techint Group n’a pas répondu.
« Nous essayons de persévérer, de rester en bonne santé afin de pouvoir continuer parce que nous ne savons pas le temps que cela prendra. Nous ne cesserons d’aller à sa recherche nous n’oublions pas une seconde qu’il est porté disparu. Et qu’ils lui ont fait des choses. Ceci nous rend fous » - Ana Lucía Lagunes Gasca, sœur de Ricardo
Gustavo Vilchis
Harcèlement judiciaire
Beaucoup de gouvernements non seulement négligent de protéger les droits de l'homme, mais instrumentalisent le système judiciaire pour attaquer les militants, autorisant des acteurs privés à faire de même. Au cours de la dernière décennie, plus de la moitié des attaques que nous avons recensées était constituée de harcèlement judiciaire (3.311), qui comprend la détention arbitraire, les assignations à comparaître abusives, les poursuites-bâillons et les procédures pénales.
Au cours des 10 dernières années, nous avons enregistré plus de 530 cas de poursuites-bâillons aussi bien civiles que pénales intentées ou initiées par des acteurs privés depuis 2015 contre les DDH qui ont soulevé des préoccupations par rapport aux activités d’entreprise. En 2024, nous avons identifié 26 cas qui portent les caractéristiques de poursuites-bâillons. L’Amérique latine est la région qui enregistre régulièrement le plus grand nombre de cas de poursuites-bâillons (191), avec le Honduras (46) et le Pérou (46) en tête de peloton dans la région. Un nombre important de cas a été enregistré aux États-Unis d’Amérique (55), en Thaïlande (54), et au Cambodge (32) de même. Soixante-neuf pour cent de ces poursuites-bâillons incluaient des chefs d’accusation qui pouvaient impliquer de longues peines de prison. Le secteur minier est responsable de près d’un tiers (31 %) du total des poursuites-bâillons.
Les poursuites-bâillons sont déguisées en mesures judiciaires légitimes, mais en réalité, il s’agit d’un abus du système judiciaire qui siphonne les ressources publiques et sape la confiance du public par rapport à l’intégrité judiciaire. Ce détournement du système judiciaire sert des intérêts privés aux dépens du travail légitime en matière de droit de l’homme. Notre étude révèle que les chefs d’inculpation les plus récurrents sont liés à la diffamation, aux dommages, à l’incitation à la commission d’un acte criminel, à l’instigation d’une grève, à la criminalité informatique, aux lois anti-boycott, au racket et à la conspiration. Les conséquences de ces délits et crimes impliquent souvent des indemnisations monétaires élevées, de lourdes peines de prison, et permettent des mesures de détention préventive, ce qui fait que les DDH sont incarcérés pendant les procédures qui peuvent durer des années.
La récente décision contre Greenpeace aux États-Unis, largement considérée comme portant les caractéristiques d’une poursuite-bâillon, en est un exemple. Le 20 mars 2025, un jury du Nord Dakota a statué en faveur de l’entreprise de combustible fossile Energy Transfer et a déclaré Greenpeace coupable de diffamation et autres allégations en rapport avec des manifestations dirigées par des Peuples autochtones contre l’Oléoduc Dakota Access. Il a fallu huit années pour connaître l’épilogue de cette affaire avec la décision d’un jury qui a décidé que Greenpeace devait verser la somme de 660 millions de dollars US de dommages et intérêts à l’entreprise multimilliardaire.
«Cette affaire devrait alarmer tout un chacun, quelle que soit son appartenance politique. Elle fait partie d'une nouvelle offensive des entreprises pour instrumentaliser notre justice afin de faire taire toute contestation. Nous devrions tous être préoccupés par l'avenir du Premier Amendement et par des poursuites comme celle-ci visant à nous priver de nos droits de manifester pacifiquement et de nous exprimer librement.» - Sushma Raman, directrice exécutive par intérim de Greenpeace USA
Le Centre de ressources a invité Energy Transfer à répondre ; la réponse complète de l’entreprise est disponible ici.
Répression des manifestations publiques et de la désobéissance civile
« L'exercice du droit de réunion pacifique est l’un des outils les plus importants dont disposent les gens pour plaider en faveur d'une action climatique et d'une protection de l'environnement plus efficaces et équitables ». - Clément Voule, ancien rapporteur spécial des Nations unies sur les droits à la liberté de réunion pacifique et d'association.
Au cours de la dernière décennie, à mesure que les impacts dévastateurs de la crise climatique sont devenus plus flagrants, des personnes du monde entier se sont organisées, ont manifesté et ont mené des actions directes pour arrêter les projets liés aux combustibles fossiles et exiger une transition vers les énergies renouvelables. En réponse à cette puissante mobilisation, souvent menée par les peuples autochtones et les jeunes, les gouvernements ont intensifié les restrictions sur le droit de manifester. Cette répression était multiforme, notamment la criminalisation des actions de protestation non violentes, l'adoption de lois sur les infrastructures critiques conçues pour protéger les projets liés aux combustibles fossiles, l'augmentation des charges opérationnelles et administratives pour les organisations de la société civile, la surveillance des manifestants, la stigmatisation des personnes qualifiées de « terroristes » ou d'« anti-développement », l'accélération des projets sans consultation significative des communautés et la restriction de la liberté d'expression et de l'accès à l'information. Cette suppression des droits de réunion pacifique, de manifester et de participer à la vie publique s'est matérialisée à la fois dans les sociétés démocratiques et autocratiques et peut avoir un effet dissuasif sur le partage d'informations sur les droits de l'homme et les risques environnementaux liés aux projets commerciaux.
La désobéissance civile des actes de violation délibérée de la loi concernant des questions d'intérêt public menés publiquement et non de façon violente, comme le blocage des routes et de la circulation, l'occupation des bureaux des fonctionnaires et le fait de s'attacher physiquement aux équipements de l'entreprise est une forme d'exercice des droits à la liberté d'expression et à la liberté de réunion pacifique garantis par les articles 19 et 21 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques (PIDCP).
Le respect de ces droits fondamentaux est essentiel pour une transition énergétique juste, entre autres questions relatives aux entreprises et aux droits de l'homme. Les consultations préalables au démarrage des opérations commerciales sont souvent insuffisantes, la manifestation devenant l'une des seules voies pour mettre en évidence les risques et les préjudices associés aux projets.
Pourtant, de nombreux gouvernements optent pour la suppression du droit de réunion pacifique plutôt que de s'attaquer aux violations des droits de l'homme et de l'environnement qui incitent les personnes à manifester. Ces dernières années, nous avons enregistré de nombreux cas d'attaques contre des personnes qui manifestaient contre des projets liés aux combustibles fossiles et appelant à une action climatique, notamment en Europe et au Royaume-Uni. Une étude récente de l’université de Bristol a révélé que la police britannique arrête les manifestants écologistes à un taux près de trois fois supérieur à la moyenne mondiale, ce qui fait du pays un leader mondial en matière de répression juridique du militantisme climatique.
Un autre exemple est la répression par le gouvernement de manifestations généralisées au Panama suite à l’approbation par l’Assemblée Nationale d’un contrat pour l’exploitation du cuivre dans la plus grande mine de cuivre à ciel ouvert d'Amérique centrale, exploitée par Minera Panamá, une filiale de la société canadienne First Quantum Minerals. Au moins 30 personnes ont été arrêtées, 21 ont été inculpées pour terrorisme, dont Damaris Sánchez Samudio et plusieurs personnes ont été blessées, dont le journaliste et activiste Aubrey Baxter, qui a perdu un œil en raison de l’usage excessif de la force policière. Abdiel Díaz et Iván Rodríguez ont été abattus par un homme armé en novembre 2023 et Tomás Milton Cedeño García a aussi été tué. Le Centre de Ressources a invité Minera Panamá et First Quantum Minerals à répondre ; sans succès.https://www.business-humanrights.org/en/admin/pages/969959/edit/#block-1857b955-c68e-40a2-9429-21df9b361aae-section
De nombreuses attaques impliquent la collusion entre l’É tat, les entreprises et d’autres acteurs non étatiques, et les auteurs sont souvent difficiles à identifier.
Sur la base de sources publiques, nos données montrent que les acteurs étatiques, notamment les policiers, les autorités locales, les forces armées et le pouvoir judiciaire, sont les auteurs directs les plus courants d'attaques contre les DDH, privilégiant souvent les profits économiques aux droits de l'homme et bénéficiant aux acteurs économiques.
États
Les états ont l’obligation première de protéger les DDH , en vertu du droit international, ils sont tenus de respecter, de protéger et de réaliser les droits de l'homme des individus sur leur territoire et/ou juridiction. Selon les PDNU et ses orientations subséquentes, cela s’accompagne de la protection contre les violations des droits de l'homme par les acteurs économiques. Cela exige de prendre les mesures appropriées pour prévenir, enquêter, punir et réparer de tels abus par le biais de politiques, de lois, de règlements et décisions judiciaires efficaces.
Pourtant, les États ne manquent pas seulement à leur devoir de protéger contre les violations des droits de l'homme par les entreprises, ils sont souvent eux-mêmes les auteurs d'attaques contre les DDH. Par exemple, ils arrêtent et inculpent des personnes exerçant leurs libertés d'expression et de réunion lors de manifestations contre des projets économiques potentiellement préjudiciables.
Entreprises
« Protéger et respecter les défenseurs des droits de l'homme n’est pas une option, mais une obligation, respectivement pour les États et les entreprises. Les entreprises les plus rationnelles, les plus avant-gardistes et les plus efficaces considéreront les défenseurs des droits de l'homme comme des partenaires. Elles vont collaborer avec eux dès le début et souvent... [E]lles se rendront compte également que c'est dans leur propre intérêt, en renforçant la gestion des risques dans son ensemble, en contribuant à instaurer la confiance et, en fin de compte, en ayant un impact positif sur l'État de droit et un environnement respectueux des droits face aux menaces croissantes pesant sur l'espace civique » - Groupe de Travail des Nations Unies sur les Entreprises & les Droits de l’Homme
Indépendamment du respect par les États de leurs obligations en matière de droits de l'homme, les entreprises ont la responsabilité de prévenir et de remédier aux violations des droits de l'homme liées à leurs activités et relations commerciales. Si les acteurs économiques causent ou contribuent à des violations des droits de l'homme affectant les DDH, leur responsabilité est claire : mettre fin aux abus et réparer tout préjudice. Même dans les cas où il n'existe pas de liens directs apparents entre les entreprises ou les investisseurs et les attaques, les acteurs économiques sont censés utiliser de manière proactive leur influence pour promouvoir le respect des droits des DDH et des libertés civiques. La responsabilité des entreprises en ce qui concerne le respect des droits de l'homme comprend un engagement continu et sérieux avec les détenteurs de droits, y compris les DDH, en soulevant des préoccupations relatives aux risques et préjudices liés à leurs opérations, leurs chaînes de valeur ou à leurs relations commerciales. Le défaut d'un engagement sérieux avec les détenteurs de droits peut entraîner des troubles sociaux, des conflits, des litiges et des conséquences financières importantes pour les entreprises et les investisseurs.
Les entreprises devraient également élaborer un engagement politique à respecter les droits des DDH, approuvé au plus haut niveau et dont la mise en œuvre est supervisée par le Conseil d'administration. Cependant, notre étude a révélé que seulement 51 des 284 entreprises évaluées par le Corporate Human Rights Benchmark (CHRB) et l’Indice de référence des énergies renouvelables du Centre de Ressources se sont publiquement engagées à ne pas tolérer ni contribuer aux attaques contre les DDH.
Seules neuf entreprises ont satisfait aux trois critères du CHRB : s'engager à ne pas tolérer ni contribuer aux attaques, exiger la même chose dans leurs relations commerciales et collaborer étroitement avec les DDH pour créer des environnements favorables. Et seules cinq sociétés minières ont pris des engagements politiques à ne pas tolérer ni contribuer aux attaques contre les DDH, et à exiger la même chose de leurs relations commerciales, malgré le nombre le plus élevé d'attaques liées à ce secteur.
Aucune société minière ne satisfait aux trois indicateurs du CHRB, ce qui est très préoccupant étant donné que l'exploitation minière est l'un des secteurs les plus dangereux pour les DDH.
Lorsqu'ils opèrent ou investissent dans des environnements où les restrictions de l'espace civique sont sévères, les acteurs économiques ont également la possibilité discrétionnaire de soutenir et de défendre de manière proactive les libertés civiques , et il est de leur intérêt de le faire. Les contextes marqués par un espace civique ouvert sont plus susceptibles d'être des environnements de travail stables et prévisibles. Les restrictions de l'espace civique limitent la connaissance des entreprises et des investisseurs sur les impacts négatifs potentiels ou réels sur les droits de l'homme, ce qui peut entraîner des risques juridiques, financiers, de réputation et autres. Les actions que les entreprises peuvent entreprendre pour soutenir un espace civique ouvert comprennent, entre autres, le fait de soulever des préoccupations concernant les restrictions des libertés civiques lors de réunions avec les responsables gouvernementaux nationaux et hôtes, de participer à une action collective par le biais d'associations professionnelles et d'initiatives multipartites, et de signer des déclarations publiques en faveur des DDH et des libertés civiques, entre autres.
Même lorsque les États sont des auteurs directs, les entreprises peuvent être liées à des attaques, par exemple en appelant la police ou les forces de sécurité de l'État afin de disperser des manifestations pacifiques ; en fournissant aux gouvernements des services ou des produits permettant une surveillance illégale ; et en entravant la syndicalisation. D'autres tactiques utilisées par les entreprises pour prendre le contrôle des terres et des ressources, conduisant souvent à des conflits et à des attaques, comprennent la division des communautés et la participation à des processus de consultation inadéquats.
La capture de l’intérêt public lorsque les acteurs économiques utilisent leur influence politique pour influer sur la prise de décision des États à leur profit plutôt qu'à celui de leurs citoyens est également répandue dans le monde entier. Cela peut inclure le lobbying contre la réglementation de la protection de l'environnement, la rédaction de lois en privé avec les législateurs pour limiter le droit de manifester et l'exploitation des lacunes de la gouvernance au profit des entreprises, entre autres actions. En outre, alors que les restrictions de l'espace civique et contre la société civile augmentent dans le monde entier, les acteurs économiques bénéficient d'incitations et de cadres qui ne favorisent pas le respect des droits de l'homme, et de l’affaiblissement de la réglementation dans de nombreux pays. Un exemple en est le règlement des différends entre Investisseurs et États. Il s’agit d’un ensemble de règles par lesquelles les investisseurs étrangers peuvent poursuivre des États si ceux-ci prennent des mesures qui affectent de façon négative leurs investissements. Cela incite les gouvernements à ignorer les préoccupations des communautés concernant les projets commerciaux et a un effet dissuasif sur la capacité des gouvernements à gouverner dans l'intérêt public, notamment en protégeant les DDH.
Entreprises reliées au plus grand nombre d'attaques
Une entreprise spécifique est mentionnée dans la moitié de l’ensemble des attaques enregistrées depuis 2015. Le plus grand nombre d'attaques s'est produit en relation avec des projets économiques menés par des entreprises dont le siège se trouve aux États-Unis, au Royaume-Uni et au Canada. Quarante pour cent des attaques reliées à des entreprises dont le siège est aux États-Unis ont eu lieu au niveau national, suivies du Pérou et du Mexique. Presque toutes les attaques reliées à des entreprises canadiennes se sont produites dans les Amériques.
Notre étude révèle que le plus grand nombre d'attaques s'est produit lorsque des personnes ont soulevé des préoccupations relatives aux dommages sociaux et environnementaux associés à de grands projets commerciaux et que l'État et/o les entreprises répriment les personnes qui exercent leur droit de manifester.
Au cours de la dernière décennie, les projets associés au plus grand nombre d'attaques étaient le projet d'extraction et de développement pétrolier du lac Albert (qui comprend le pipeline East African Crude Oil Pipeline) (Ouganda et Tanzanie), Inversiones los Pinares (Honduras), le pipeline Dakota Access (États-Unis), la mine de Las Bambas (Pérou) et le pipeline Line 3 (États-Unis et Canada). Cliquez sur les cartes ci-dessous pour découvrir les détails des attaques et de ces projets.
Aucune des entreprises impliquées dans ces projets n'a d'engagements de politique générale, publiquement accessibles, à ne pas contribuer ou tolérer les attaques contre les DDH. TotalEnergies EP Ouganda a publié une déclaration selon laquelle elle ne « tolère aucune menace, intimidation, harcèlement ou violence contre ceux qui promeuvent pacifiquement et légalement les droits de l'homme en relation avec nos activités ». Dans la version la plus récente de sa Note d'information sur les droits humains, TotalEnergies déclare : « Nous estimons qu’un espace civique ouvert et le rôle des organisations de la société civile ainsi que des autres défenseurs des droits humains sont nécessaires pour garantir le respect des droits humains et faire entendre les préoccupations des titulaires de droits. Dans le cadre de nos activités, nous encourageons le dialogue et les échanges avec les défenseurs des droits humains. »
Les attaques contre les DDH surviennent en relation avec presque chaque secteur d’activité dans chaque région du monde. Au cours de la dernière décennie, les secteurs liés au plus grand nombre d’attaques sont l’exploitation minière (1.681), l’agro-industrie (1.154), les combustibles fossiles (792), l’énergie renouvelable (454) et l’exploitation forestière (359).
Ces cinq secteurs sont intimement liés à la crise climatique. Les combustibles fossiles et l’agro-industrie sont les industries les plus polluantes. L’exploitation minière, l’agro-industrie, les combustibles fossiles et l’exploitation forestière sont les principaux facteurs de la déforestation.
Focus sur les secteurs
La section suivante fournit des informations supplémentaires sur trois secteurs clés : 1) l'exploitation minière, qui est la plus dangereuse pour les DDH ; 2) l’énergie renouvelable, étant donné le besoin urgent d'une transition énergétique et le potentiel du secteur à s'engager dans des pratiques plus responsables ; et 3) la technologie, car les médias sociaux, les logiciels espions et d'autres technologies sont utilisés pour attaquer les DDH et de nombreuses entreprises technologiques ont largement ignoré leurs responsabilités de respecter les droits des DDH.
Exploitation minière
Exploitation minière
Le secteur minier est de loin le plus dangereux pour les DDH, avec près de 1 700 attaques au cours des dix dernières années. Plus d’un tiers des DDH assassinés au cours de la dernière décennie soulevaient des préoccupations concernant les projets miniers. Près de 40 % de ces 384 défenseurs étaient des autochtones.
En outre, 60 % des attaques liées à l'exploitation minière sont concentrées dans seulement sept pays : l’Inde (182), les Philippines (176), le Pérou (173), le Honduras (141), le Mexique (119), le Guatemala (110) et la Colombie (104).
Alors que la part des minéraux utilisés pour la transition énergétique augmente, il est urgent de briser le cycle des pratiques néfastes. Plus de la moitié des minéraux de transition sont situés sur ou près des terres des peuples autochtones.
Notre Outil de suivi des minéraux de transition, qui suit les impacts sur les droits de l'homme de l'extraction des minéraux clés dans la transition énergétique, montre que les attaques ont souvent lieu dans le contexte du développement d'un projet minier lorsque les préoccupations des communautés locales ne sont pas prises en compte dans le processus de consultation et que ceux qui les défendent sont réprimés. Il existe un continuum de violence entre les préjudices causés par les projets miniers aux communautés, les impacts négatifs sur les environnements dans lesquels elles vivent, et les attaques contre les membres des communautés qui expriment leurs préoccupations face à ces préjudices et défendent la protection de leurs droits.
Chaînes d'approvisionnement dans le secteur minier
La répression des libertés civiques et la ruée mondiale pour extraire davantage de minéraux engendrent davantage de conflits et une répression accrue des DDH. La violence déplorable et la crise humanitaire en République Démocratique du Congo orientale est liée à l’extraction du coltan, qui est utilisé dans une large gamme d'appareils électroniques. Au Brésil, des rapports ont identifié des entreprises potentiellement liées à l’or illégalement extrait des terres des peuples autochtones, y compris le Territoire autochtone Yanomami. Le Centre de Ressources a recensé au moins 16 attaques contre les Peuples autochtones Yanomami, qui sont confrontés à une crise humanitaire provoquée par les impacts des activités minières illégales. Le cuivre, un minerai essentiel pour l'électrification,est associé à 87 attaques sur des opérations minières à grande échelle depuis 2015, dont 21 poursuites-bâillons. En Inde, en octobre 2023, une consultation publique a eu lieu pour le Bloc de bauxite de Sijimali , qui a été attribué à Vedanta Limited plus tôt dans l’année, dans l'Odisha dans un contexte de forte présence policière et à la suite de l'arrestation de plus de 20 dirigeants communautaires qui s'étaient prononcés contre la mine. En avril 2024, le Centre de ressources a invité Vedanta Limited à répondre ; la réponse complète de l’entreprise est disponible ici.
À l'échelle mondiale, le récent afflux de pays qui foncent pour obtenir les minéraux critiques afin de concrétiser les ambitions en matière d'énergie renouvelable, d'aéronautique et de défense crée un dangereux précédent pour une expansion minière rapide, souvent sans tenir suffisamment compte des droits de l'homme, ce qui constitue une grande menace pour les DDH et leurs communautés.
L'ampleur significative des attaques contre les DDH, soulevant des préoccupations en matière de droits de l'homme et d'environnement en rapport avec les opérations minières, révèle un échec des efforts de diligence raisonnable en matière de droits de l'homme de la part des entreprises minières ainsi que des utilisateurs finaux de ces minéraux. Le contrôle de la société civile et de nouvelles réglementations sont nécessaires pour briser ce cycle d'attaques. Le secteur automobile est depuis longtemps confronté à un examen minutieux en raison des violations des droits de l'homme dans ses chaînes d'approvisionnement, notamment le travail des enfants en République Démocratique du Congo dans l’extraction du cobalt. En 2023, le règlement de l’UE relatif aux batteries a introduit des exigences de diligence raisonnable sans précédent pour les utilisateurs finaux de minéraux pour batteries, poussant les entreprises vers une plus grande transparence et responsabilité. De récentes analyses montrent une amorce de progrès en matière de politiques d'approvisionnement responsable en minéraux dans le secteur automobile.
En 2024, le Conseil international des mines et métaux (ICMM) s'est engagé à respecter les droits des DDH dans ses Principes miniers et a ajouté un outil pour les DDH à ses orientations de diligence raisonnable en matière de droits de l'homme pour les entreprises membres. Un autre progrès a été la publication de nouvelles orientations sur les DDH par l' Initiative des Principes Volontaires sur la Sécurité et les Droits de l'Homme en décembre 2023. L'Initiative des Principes Volontaires est une plateforme mondiale multipartite basée sur l'adhésion, soutenant la mise en œuvre des Principes Volontaires, qui sont des lignes directrices pour les entreprises extractives sur la manière de maintenir leurs opérations sûres et sécurisées tout en opérant dans un cadre respectueux des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La nouvelle publication donne des conseils aux entreprises membres, dont les entreprises minières, sur la manière d'identifier et de réduire les risques pour les DDH, d'intégrer les conclusions des évaluations des risques et la non-tolérance des attaques dans les dispositifs de sécurité, de réagir lorsque des menaces et des attaques surviennent, et de s’assurer que les mécanismes de traitement des plaintes sont sûrs pour les DDH.
Le véritable test sera cependant la mise en œuvre de ces engagements, en particulier dans le contexte de l'ICMM et d'autres associations professionnelles lançant une consolidation de leurs normes en un seul schéma global que de nombreux membres de la société civile ont critiqué.
Énergie renouvelable
Énergie renouvelable
Nous vivons une période charnière dans l'évolution du système énergétique mondial. Nous avons la possibilité d'assurer une transition juste en créant un nouveau secteur énergétique qui respecte et promeut les droits de l'homme.
Cela signifie que les entreprises opérant tout au long de la chaîne de valeur des énergies renouvelables (ER) ont la responsabilité d'enquêter, d'évaluer et d'atténuer les risques d'impacts négatifs sur les droits de l'homme associés à leurs activités commerciales, y compris en collaborant avec tout partenaire impliqué dans les attaques. Les attaques contre les DDH ne surviennent pas seulement en amont de la chaîne de valeur des ER, c'est-à-dire au niveau de l'extraction des minéraux de transition, mais aussi en relation avec les installations ER dans tous les sous-secteurs des ER, hydroélectricité, éolien, solaire, géothermie et biocarburant.
Alors que certaines entreprises donnent l'exemple de bonnes pratiques, beaucoup sont à la traîne. Notre Référentiel sur les énergies renouvelables a révélé que les trois quarts des principaux promoteurs de projets éoliens et solaires évalués ont mis en place des politiques rigoureuses en matière de droits de l'homme, conformes aux Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme. Cependant, seules deux entreprises mentionnent les droits des Peuples autochtones ou ont des engagements connexes qui ne sont pas ancrés dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Peuples autochtones (DNUDPA).
L'hydroélectricité est de loin le sous-secteur des ER lié au plus grand nombre d'attaques. Le Centre de Ressources reconnaît que de nombreuses organisations et communautés ne considèrent pas les grands projets hydroélectriques comme une source d'énergie renouvelable, en raison de leurs impacts sociaux, culturels et environnementaux souvent graves. Nous l'incluons dans notre analyse, car cela fait partie des nombreux plans d'action climatique gouvernementaux et permet d’avoir une vue d'ensemble complète des risques importants liés à la transition énergétique. Cependant, les abus révélés dans notre base de données soulignent et confirment les préoccupations mêmes de ces groupes : au cours des dix dernières années, les projets hydroélectriques ont été associés à 365 attaques contre des DDH, dont plus de 100 DDH tués. Le plus grand nombre d'attaques liées aux projets hydroélectriques s'est produit au Honduras, au Guatemala, au Mexique, en Colombie, aux Philippines et en Inde.
Ces attaques résultent généralement de la résistance des populations au déplacement forcé, aux atteintes à leurs moyens de subsistance, à l'accès à l'eau et à la culture, et au fait de ne pas être incluses dans les décisions concernant les projets qui affectent leur vie de manière aussi profonde. Inversement, les Peuples autochtones – en particulier à travers le Partenariat pour l’Énergie Durable avec les Peuples autochtones – innovent avec une forme d'hydroélectricité plus respectueuse de l'environnement et socialement responsable, en mettant en place des systèmes de micro-hydroélectricité au fil de l'eau culturellement appropriés et durables dans des pays comme la Malaisie, le Népal et le Cameroun.
Le tableau est moins sombre en ce qui concerne les projets éoliens, solaires et géothermiques. Des exemples de co-propriété autochtone inspirante dans les projets d’énergie renouvelable démontrent qu'avec le cadre réglementaire adéquat et un environnement propice à la construction de partenariats équitables, des modèles économiques qui permettent à la fois d'autonomiser les populations, d'éviter les risques et les conflits en matière de réputation et d'exploitation, de lutter contre la crise climatique et de promouvoir les Objectifs de Développement Durable, sont possibles. En outre, il est encourageant de constater que, selon la dernière édition de notre Indice de référence des énergies renouvelables, 8 des 28 plus grandes entreprises éoliennes et solaires du monde ont publiquement pris l’engagement de respecter les droits des DDH contre zéro dans l'édition précédente de notre Indice de référence en 2021. Cela représente la plus forte augmentation de toutes les catégories évaluées et témoigne d'un engagement et d'une sensibilisation croissants dans ce domaine. Cependant, il existe toujours un écart préoccupant entre la politique et la pratique, et une marge d'amélioration significative demeure. Depuis 2015, nous avons recensé près de 80 attaques contre des DDH en relation avec des projets éoliens, solaires, de bioénergie et géothermiques. Chacune de ces attaques est inexcusable : une tragédie pour les individus, les mouvements, leurs familles et leurs communautés, un abus des droits de l'homme et une menace directe à une transition énergétique juste et équitable.
Technologie
Technologie
« Si l'espace en ligne est indispensable aux défenseurs des droits qui l'utilisent pour dénoncer les violations des droits de l'homme et les dommages environnementaux, nous constatons une détérioration des mesures prises par les plateformes pour protéger les défenseurs et autres utilisateurs à haut risque. Non seulement les DDH sont soumis à des niveaux préoccupants d'abus en ligne, mais ces menaces en ligne peuvent se traduire par des préjudices hors ligne, notamment des arrestations et des violences physiques. Nous craignons qu'à mesure que les plateformes réduisent leurs mesures de sécurité et d'intégrité et ignorent ces risques, les DDH se retirent des espaces en ligne, ce qui permettra aux grands pollueurs et aux auteurs de violations des droits de l'homme de diffuser plus facilement leurs faux narratifs. » – Chido Dunn, Global Witness
Au cours de la dernière décennie, le développement et l'expansion des technologies numériques ont contribué à faciliter le travail essentiel des DDH – de la surveillance des abus à l'organisation transnationale. Cependant, ces technologies ont également donné naissance à de nouvelles vulnérabilités et les États ainsi que les acteurs non étatiques s’en servent pour cibler les DDH et leur travail. Cela inclut la suppression ou la censure d'informations partagées par les DDH en ligne ; la suspension d'Internet pour restreindre la liberté d'expression et l'organisation en ligne ; l'intimidation, le harcèlement et les campagnes de diffamation contre les défenseurs sur les plateformes de médias sociaux ; la facilitation de la violence en ligne basée sur le genre contre les femmes et les DDH des personnes ayant diverses identités de genre. À cela s’ajoute le « doxxing » (dévoiler publiquement des informations personnelles en ligne sur des personnes avec une intention malveillante) ; la diffusion de discours de haine en ligne menant à la violence hors ligne ; et l'utilisation de logiciels espions pour surveiller les activités des DDH.
La situation est encore plus grave pour les DDH opérant dans des régimes autoritaires avec un état de droit faible, où les outils numériques sont devenus des instruments de répression plutôt que des facilitateurs de droits. Même au cours de l'année écoulée, il y a eu un bouleversement dans la relation entre les dirigeants du secteur technologique et leur engagement envers les droits de l'homme, car les grandes entreprises ont réduit les protections pour les groupes marginalisés ; supprimé les initiatives en matière de diversité, d'équité et d'inclusion ; censuré des utilisateurs qui dénoncent les violations des droits de l'homme en Palestine; réduit la vérification des faits; et fait marche arrière par rapport à leurs engagements en faveur d’une IA éthique.
Ce problème qui se pose avec acuité est davantage aggravé par l'opacité élevée du secteur technologique, qui ne reconnaît pas et n’évalue pas son rôle dans la facilitation des violations des droits de l'homme. Entre janvier 2013 et décembre 2023, le Centre de Ressources a adressé plus de 700 invitations à plus de 300 entreprises technologiques pour répondre aux allégations d'abus. Nous n'avons reçu de réponses que pour 48 % d'entre elles – un taux de réponse inférieur de loin à celui des autres secteurs d'activité. Ce manque de transparence facilite non seulement l'impunité, mais c’est également le signe d’une réticence des entreprises technologiques à s'engager de manière adéquate dans la diligence raisonnable en matière de droits de l'homme. Les défenseurs du Sud ont également partagé de nombreux défis liés à la collaboration avec les entreprises technologiques sur les questions de droits numériques.
La Declaration+25, éclairée par des consultations avec plus de 700 DDH, a permis d’identifier les attaques favorisées par la technologie contre les DDH comme une lacune de la Déclaration des Nations Unies sur les Défenseurs des Droits de l'Homme et une tendance croissante au cours de la dernière décennie. En fin mars 2025, le Conseil des Droits de l'Homme, dirigé par la Norvège, a adopté une résolution qui étaye davantage les obligations des États à protéger les DDH à l'ère numérique, notant que les responsabilités des entreprises technologiques incluent d'anticiper et de traiter les préjudices liés à l'utilisation de leurs produits et services, et d’encourager les entreprises à conduire une diligence raisonnable en matière de droits de l'homme conformément aux PDNU tout au long du cycle de vie et de la chaîne de valeur de leurs services et produits afin d'identifier, de prévenir et de traiter les risques pour les DDH.
Nos données révèlent une tendance persistante d'attaques contre les défenseurs de la terre et de l'environnement au cours de la dernière décennie, représentant trois quarts de toutes les attaques. En 2024, 89 % des DDH attaqués étaient des défenseurs de la terre et de l'environnement. En outre, 96 % des défenseurs autochtones victimes d'attaques au cours de la dernière décennie défendaient les droits à la terre et à l’environnement, ce qui souligne leur rôle de premier plan dans la protection des ressources naturelles et de la planète.
Les personnes qui s'organisent pour de meilleures conditions de travail, qu'elles fassent partie de syndicats organisés ou de la main-d'œuvre générale, ont également été attaquées, avec plus de 965 attaques enregistrées. Notre recensement n'inclut pas les licenciements abusifs, qui sont une forme courante de représailles contre les travailleurs et les dirigeants syndicaux, ce qui suggère que le nombre réel d'attaques est beaucoup plus élevé. La plupart ont eu lieu dans les secteurs de l'habillement et du textile, de l'agro-industrie et de l'exploitation minière.
« En Ouzbékistan, plusieurs institutions de financement du développement (IFD) (Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement, Société Financière Internationale et Banque Asiatique de Développement) ont financé la société cotonnière Indorama Agro, l'un des plus grands producteurs de coton du pays, malgré les représailles perpétrées par l’entreprise, les responsables gouvernementaux et les services de sécurité contre les travailleurs, les membres de syndicats et les défenseurs des droits de l'homme… Les services de sécurité, les responsables gouvernementaux et les représentants d'entreprise menacent et harcèlent systématiquement les travailleurs et agriculteurs qui tentent de dénoncer, rendant presque impossible la documentation de ces violations des droits… Des organisations internationales telles que le Forum ouzbek pour les droits de l'homme et le CEE Bankwatch Network ont soulevé ces préoccupations auprès des IFD finançant le projet, mais à ce jour, les banques de développement n'ont pas pris de mesures efficaces pour remédier à ces représailles. » – Rapport sur le financement de la répression, Coalition for Human Rights in Development
Le Centre de ressources a invité la BERD, la SFI et la BAD à répondre ; les réponses de la SFI, de la BAD et la BERD sont disponibles ici. La Indorama Agro n’ont pas répondu.
Les journalistes ont également été pris pour cible dans près de 600 attaques, représentant 9 % des cas à l’échelle mondiale. Près de 40 % de ces attaques ont eu lieu en Asie et dans le Pacifique, suivies de 20 % en Amérique latine. La plupart des journalistes rendaient compte de questions liées au climat, à la terre et à l’environnement (60%) ou de corruption (24%). Ces dernières années, les attaques contre la presse et les médias se sont intensifiées, restreignant sévèrement l'accès à l'information et limitant la sensibilisation du public à la destruction de l'environnement et à la responsabilité des entreprises. En Allemagne et en Italie, par exemple, des journalistes ont été détenus pour avoir rendu compte des manifestations climatiques du groupe environnemental Last Generation, qui manifeste contre l'utilisation des combustibles fossiles.
Focus sur les défenseurs en danger
Cette section fournit des informations supplémentaires sur le rôle de leadership des femmes, des filles, des personnes de genre divers, des peuples autochtones et des communautés dans la défense des droits humains et de l’environnement, ainsi que sur les violations de droits et les attaques auxquelles ils et elles sont confrontés.
Femmes, filles et personnes de genre divers
Femmes, filles et personnes de genre divers
Co-écrit avec le Fonds d’Action Urgente pour l’Activisme Féministe et Fondo de Acción Urgente para América Latina y el Caribe
« Au début, lorsque j'écrivais des articles sur la question minière, les représentants de la société minière parlaient à mes proches dans mon village en particulier à mes frères pour essayer de m'influencer afin que je retire ou modifie le contenu des articles... Des personnes liées à la société minière ont commencé à me suivre... Cela s’accompagnait de prises de photos de moi dans mon domicile et leur publication sur les réseaux sociaux... Dans les publications, ils disaient que j'hébergeais la personne qui enquêtait sur le projet minier chez moi, suggérant que j’offrais des services sexuels ; les gens ont écrit des choses comme : « C'est une pute ». Parce que l'entreprise disposait de beaucoup de ressources financières, elle a promu ce contenu vraiment méchant sous forme de publicités sur les réseaux sociaux en utilisant de faux profils et de fausses pages... Au final, personne n'a été tenu responsable. » - Femme journaliste et défenseur des droits de l'homme et de l’environnement, mise en avant dans la Campagne Activisme Féministe Sans Peur du Fonds d’Action Urgente
Partout dans le monde, les femmes, les filles et les défenseurs des personnes ayant diverses identités de genre s'organisent et agissent pour faire face aux crises climatiques, politiques et humanitaires et protéger leurs communautés, leurs terres, leurs territoires et leurs ressources contre les préjudices causés par les entreprises. Bien que les défenseurs de la diversité de genre soient ciblés en raison de leur travail en faveur des droits de l'homme, les femmes, les filles et les défenseurs des personnes ayant diverses identités de genre peuvent subir différents types d'attaques et font face à des risques dans différentes sphères lorsqu'ils remettent en question à la fois le pouvoir des entreprises et les normes de genre patriarcales dans la société, leurs organisations et leurs communautés. Parmi ces défenseurs des droits de l'homme, les risques sont encore plus élevés pour ceux qui sont les plus marginalisés par les systèmes d'oppression en raison de la race, de l'ethnicité, des capacités et d'autres identités, comme les femmes autochtones et afro-descendantes. Elles sont confrontées à de plus grandes barrières en matière de protection et de ressources pour prévenir, atténuer et guérir des menaces et préjudices.
Nafisa Ferdous
Les attaques contre les femmes, les filles et les défenseurs des personnes ayant diverses identités de genre incluent les menaces en ligne de nature sexiste et sexualisée, les violences sexuelles, les campagnes de diffamation visant à nuire à leur réputation, le harcèlement au sein de leurs organisations, ainsi que les violences conjugales et familiales liées à leur défense des droits de l'homme en dehors du foyer. Dans toutes les régions, la montée des mouvements fondamentalistes et autoritaires de droite a intensifié et normalisé cette violence de la part d'acteurs étatiques et non étatiques. Ces tactiques visent à stigmatiser, isoler et faire taire ces défenseurs, les rendant plus vulnérables aux réactions négatives. Comme les femmes et les défenseurs des personnes ayant diverses identités de genre sont plus susceptibles d'être responsables des soins aux familles, aux communautés et aux organisations, leur capacité à prendre soin d'eux-mêmes et à éviter l'épuisement professionnel est encore plus limitée et leurs enfants et les membres de leur famille sont souvent également ciblés.
Selon l'expérience de la femme défenseur citée ci-dessus, « Votre vie personnelle est complètement affectée lorsque vous êtes un écologiste, lorsque vous protégez la nature. J'ai attrapé une maladie auto-immune et j'ai découvert que j'avais un problème de thyroïde. Plus je fais des recherches sur cet état, plus je suis convaincue que ma santé physique est affectée par mon état émotionnel. Et ce n'est pas seulement moi , toutes les personnes impliquées dans cela ont des problèmes de santé que nous avons eus en raison de notre participation active à cette campagne. Et nous n'avons pas de soutien psychologique. Nous essayons littéralement de ne pas nous noyer. »
Dans une étude réalisée par SAGE Fund sur les femmes qui défendent leurs terres, territoires, ressources et le climat contre les projets extractifs, de nombreuses femmes interrogées ont déclaré que les dommages psychologiques causés par les campagnes de diffamation en ligne étaient l'une des formes de préjudice structurel les plus pernicieuses et à long terme auxquelles elles sont confrontées. Alors qu'une attaque sur cinq recensée par le Centre de Ressources au cours de la dernière décennie visait les femmes, les filles et les défenseurs des personnes ayant diverses identités de genre, nous savons que l'échelle est supérieure, car de nombreuses attaques ne sont jamais divulguées en public en raison de la stigmatisation sociale et des problèmes de sécurité.
Accusations d’actes criminels des Peuples autochtones
Accusations d’actes criminels des Peuples autochtones
Co-écrit avec Indigenous Peoples Rights International (IPRI)
Les Peuples autochtones sont à l’avant-garde pour faire face à la crise climatique, gérant plus de 20 % de la surface terrestre de la planète. S'appuyant sur des milliers d'années d'expertise en matière de gestion de l'environnement, les Peuples autochtones sont des leaders essentiels pour la protection de notre planète.
Les Peuples autochtones sont au cœur de la crise climatique ; pourtant, ils sont toujours confrontés à la colonisation et à la discrimination systémique. Malgré des victoires juridiques durement acquises, leurs droits sont régulièrement violés par les États et les entreprises.
Les acteurs étatiques et non étatiques continuent de violer les droits des Peuples autochtones à l'autodétermination, à l'intégrité culturelle, à leurs terres, territoires et ressources, ainsi qu'au CLPE. Notre étude révèle également que les défenseurs autochtones subissent un niveau d'attaques démesurément élevé, soulignant la nature ciblée et systémique de ces violations et abus. Bien que les Peuples autochtones n représentent environ que 6 % de la population mondiale, ils ont subi 21 % des attaques enregistrées au cours de la dernière décennie. Cela inclut plus de 1.320 cas d'assassinats, de menaces de mort, de harcèlement judiciaire, d'intimidation, d'enlèvement, de détention arbitraire et d'autres formes, y compris des attaques en ligne contre des défenseurs autochtones. 73 % de ces attaques se sont produites en Amérique latine. De plus, 21 % de ces attaques visaient des femmes autochtones, des personnes bispirituelles et des défenseurs des personnes ayant diverses identités de genre. La peur de représailles signifie que de nombreuses attaques contre les peuples autochtones ne sont pas signalées, ce qui veut dire que les chiffres réels sont probablement beaucoup plus élevés. Les défenseurs autochtones sont également plus susceptibles d'être tués que les défenseurs non autochtones. Une attaque sur quatre contre des défenseurs autochtones se termine par un meurtre, presque le double du taux pour les défenseurs non autochtones. Le plus grand nombre de défenseurs autochtones tués a été enregistré au Brésil, suivi des Philippines et du Mexique.
Ces attaques sont motivées par une combinaison de facteurs qui permettent l'empiètement des acteurs économiques sur les terres et territoires des Peuples autochtones en toute impunité, voire avec le soutien d’acteurs étatiques. Le colonialisme et le racisme systémique ont renforcé les déséquilibres de pouvoir, excluant délibérément les Peuples autochtones de la prise de décision et restreignant leur accès à la justice et aux recours. Intrinsèquement, les États privilégient souvent une croissance économique non durable par le biais de projets extractifs, énergétiques et d'infrastructures au détriment des droits des Peuples autochtones sur leurs terres et leurs ressources. Lorsque les communautés autochtones soulèvent leurs préoccupations telles que le déni de l'autodétermination, du CLPE et la violation de leurs droits fonciers, elles sont souvent confrontées à la violence et à des accusations d’actes criminels par la police, l'armée et les tribunaux. Les femmes autochtones sont confrontées à une vulnérabilité accrue aux abus, y compris le viol et la violence sexuelle, de la part du personnel de sécurité des entreprises. La négligence de l'État et le déni de droits créent un vide de pouvoir exploité par le crime organisé, les paramilitaires et les entreprises pour prendre le contrôle des terres des peuples autochtones.
Face à la violence persistante, les communautés autochtones se serrent les coudes. En 2024, l'IPRI a documenté 20 cas emblématiques de violations des droits, affectant directement 703 personnes touchées par des projets liés à l'huile de palme, à l'exploitation minière et aux barrages aux Philippines, au Guatemala et au Pérou. Grâce à son Fonds de Défense Juridique et de Sanctuaire, l'IPRI a offert un soutien financier et juridique essentiel, aidant les dirigeants et les communautés autochtones à résister à l'injustice et à faire entendre leur voix sur la scène mondiale.
Les communautés autochtones ont également remporté des victoires importantes devant les tribunaux, fait progresser la responsabilité des entreprises, joué un rôle de premier plan dans la protection de la biodiversité et tracé la voie à suivre pour une transition énergétique juste. Plusieurs projets commerciaux ont été confrontés à des risques financiers et juridiques majeurs en raison du non-respect présumé des droits des peuples autochtones. Le géant malaisien de la production d'huile de palme Sime Darby, par exemple, a dépensé plus de 200 millions de dollars US pour ses opérations au Libéria et a enregistré une perte de valeur de 26,81 millions de dollars US pour l’exercice 2018, pour n'avoir pas réussi à obtenir un consentement libre, préalable et éclairé. Face à l'opposition généralisée de la communauté et aux recours juridiques, l'entreprise a finalement cédé ses actifs de plantation pour seulement 1 dollar US, ce qui a entraîné d'importantes dépréciations et pertes financières. D’autres exemples incluent l’annulation du projet Guna Sicarú d’EDF au Mexique et la suspension par Enel de son projet Windpeshi en Colombie en raison des manifestations et des retards. Ces cas mettent en évidence les risques majeurs auxquels les entreprises sont confrontées lorsqu'elles ignorent ou outrepassent les droits des Peuples autochtones. Au-delà des pertes financières, ces conflits retardent les projets, sapent la confiance des investisseurs et ternissent la réputation des entreprises.
Alors que la concurrence pour les ressources s'intensifie dans le contexte de la crise climatique et des tensions géopolitiques, les défenseurs autochtones sont confrontés à des menaces croissantes. Sans la pleine mise en œuvre de la DNUDPA et l'intégration des droits des Peuples autochtones dans la transition énergétique, il y a un risque d'escalade de la violence et de remise en cause des contributions majeures des peuples autochtones à la protection de la planète. Les États et les entreprises doivent agir maintenant pour garantir une action climatique fondée sur les droits, équitable, inclusive et durable.
Protection collective : les communautés se défendent
Protection collective : les communautés se défendent
Co-écrit avec L’Initiative Zéro Tolérance
Partout dans le monde, les Peuples autochtones, les communautés afro-descendantes et les défenseurs locaux de l’environnement ont mis en place leurs propres systèmes de protection contre la violence, les accusations d’actes criminels et le déplacement. De la protection de leurs territoires contre la déforestation à l’organisation de réseaux de réponse rapide, la protection collective ne se limite pas à la ssécurité : il s’agit d’une question de survie.
Pour de nombreuses communautés, les menaces auxquelles elles sont confrontées ne sont pas des actes isolés de violence contre les dirigeants, mais font partie de schémas plus larges d'intimidation contre le collectif, conçus pour les chasser de leurs terres. Les entreprises cherchant à exploiter les ressources, les groupes criminels profitant de la déforestation et même les acteurs étatiques complices de ces abus utilisent une combinaison de coercition, de campagnes de diffamation, de harcèlement juridique et d'attaques directes pour saper la résistance communautaire. En réponse, les communautés ont élaboré des stratégies de protection collective qui sont profondément enracinées dans la dynamique locale, les structures sociales, les connaissances ancestrales et la prise de décision collective.
Les stratégies de protection collective peuvent prendre de multiples formes et sont adaptées aux besoins et à la dynamique de chaque communauté et aux menaces auxquelles elle est confrontée. Certaines communautés mettent en place leurs propres gardes autochtones qui patrouillent et surveillent leur territoire. Certaines élaborent des protocoles qui définissent les conditions d’interaction avec les entreprises, tandis que d’autres renforcent leurs systèmes de gouvernance pour empêcher les acteurs extérieurs de les diviser.
Les études réalisées par l’Initiative Zéro Tolérance ont permis d’analyser plusieurs stratégies de protection collective en Amérique latine. Un exemple emblématique est La Garde autochtone des femmes de Napo, Yuturi Warmi en Équateur. En 2020, lorsque les opérations minières ont commencé sans le CLPE des communautés, les femmes autochtones Kichwa de l'Amazonie équatorienne se sont organisées pour défendre leur territoire. Dès le début, elles ont fait face à des menaces - l’un de leurs leaders a reçu ce message glaçant : « Ils ont dit aux principaux dirigeants qu'au lieu d’organiser un carnaval, ils devraient acheter des cercueils. » Malgré les risques, elles sont restées fermes. « Nous avons dit que nous ne permettrions rien de tout cela. Ce sont les femmes qui ont semé la graine. » Leur résistance a inspiré d'autres personnes, des femmes des communautés voisines qui les ont rejointes par solidarité. Aujourd'hui, Yuturi Warmi compte environ 30 membres actifs. Se déclarant Garde autochtone, elles s'organisent pour surveiller le territoire, expulser les mineurs et protéger leurs terres, leurs traditions ancestrales, leur médecine, leur éducation, et leurs projets de subsistance. « Nous englobons tout cela. C’était difficile pour nous d'essayer de séparer ces différents aspects, car, en réalité, sans l’unification de ces approches, nous ne pouvons pas défendre notre territoire », déclare María José Andrade Cerda, l'une des membres du groupe.
Focus sur les réussites
Malgré les risques graves et la violence auxquels les DDH ont été confrontés au cours de la dernière décennie, leur courageuse résistance a conduit à des réformes réglementaires, à l'adoption de nouvelles lois, à la responsabilité en cas de préjudice et à des pratiques commerciales plus responsables.
Peuples autochtones U’wa c. Colombie
Peuples autochtones U’wa c. Colombie
En 2024, la Cour interaméricaine des droits de l'homme a rendu une décision dans l'affaire du peuple autochtone U'wa et de ses membres contre la Colombie, traitant des violations des droits de l'homme liées à des projets pétroliers, gaziers et miniers autorisés par l'État sur le territoire U'wa. Selon Earth Rights International, « [p]our la première fois, la Cour a fait référence à la “ triple crise planétaire de” la pollution, la perte de biodiversité et la crise climatique en relation avec l’obligation de l'État de respecter et de garantir le droit à un environnement sain, avec des implications importantes pour le triptyque entreprises, droits de l'homme et droits des peuples autochtones en Amérique latine. »
Photo: Laura Gómez Unda (courtesy of EarthRights International)
Loi minière de la Sierra Leone
Loi minière de la Sierra Leone
En août 2022, la Sierra Leone a adopté une nouvelle législation exigeant que les entreprises obtiennent le consentement explicite des communautés locales avant de commencer des activités minières, industrielles ou agricoles. De plus, les résidents propriétaires de terres pourront opposer un veto à tout projet les concernant.
La loi prévoit également la création de comités locaux d’utilisation des terres, chargés de décider de la gestion des terres communautaires, et impose que ces comités soient composés d’au moins 30 % de femmes. Cette nouvelle législation est considérée comme l’une des plus protectrices des communautés au niveau mondial.
SAVE Rivers: #StopTheSlapp
SAVE Rivers: #StopTheSlapp
En septembre 2023, l’entreprise d’exploitation forestière Samling Plywood a retiré une plainte pour diffamation, engagée en 2021, contre SAVE Rivers. SAVE Rivers est une ONG locale basée à Sarawak, Bornéo, en Malaisie, qui travaille avec les peuples autochtones pour protéger les terres, les rivières et les bassins versants contre les dommages environnementaux, préserver la biodiversité et soutenir les peuples autochtones dans la défense de leurs droits. La plainte faisait suite à une série d'articles publiés sur le site web de SAVE Rivers qui attiraient l'attention sur les préoccupations des communautés autochtones affectées par l'octroi d'une certification d'exploitation forestière. En réponse, SAVE Rivers a lancé une campagne mondiale de solidarité intitulée #StoptheSLAPP pour lutter contre le cas de poursuite-bâillon.
Nous célébrons les progrès et les réalisations de cette décennie. Vous trouverez ci-dessous une chronologie de certains de ces développements. Un rapport plus détaillé sera disponible prochainement, commandé par le Service International pour les Droits de l’Homme et soutenu par le Centre de Ressources.
Perspectives d’avenir : Recommandations
Ces développements soulignent qu'un changement positif et un avenir plus juste et durable centrés sur le respect des droits de l'homme et de la nature sont possibles. À seulement cinq ans de la réalisation des termes de l'Accord de Paris et pour aider à atténuer les pires impacts de la crise climatique, il est d'autant plus urgent que les acteurs économiques assument leur responsabilité de respecter les droits de l'homme et de se faire les champions d'une pratique commerciale responsable. Écouter et respecter les droits des DDH est essentiel, ainsi que de tirer parti de leur voix pour soutenir un espace civique ouvert. S'appuyant sur les enseignements de la dernière décennie, les recommandations suivantes proposent une voie pour la réalisation d'économies durables et respectueuses des droits.
États
États
Pour les états :
- Adopter et mettre en œuvre une législation reconnaissant le pouvoir de défendre les droits et le rôle essentiel des DDH dans la promotion des droits de l'homme, du développement durable et d'un environnement sain, ainsi que s'engager à une tolérance zéro contre les attaques (recommandations plus détaillées disponibles ici). Cela doit inclure la reconnaissance juridique des droits spécifiques des Peuples autochtones et afro-descendants (recommandations plus détaillées disponibles ici).
- Prendre des mesures pour favoriser un environnement sûr, respectueux et propice pour la société civile, y compris l'abrogation de toute législation criminalisant les défenseurs des droits humains et l'exercice de leurs libertés d'expression, de réunion et d'association.
- Implémenter pleinement l’Accord de Paris et y adhérer ou, s’il est déjà ratifié, mettre pleinement en œuvre les normes, notamment en veillant à la participation du public aux débats et décisions concernant le changement climatique et l’environnement.
- Adopter des lois nationales pour mettre en œuvre les Principes Directeurs des Nations Unies relatifs aux Entreprises et aux Droits de l'Homme, y compris une législation obligatoire sur la diligence raisonnable en matière de droits de l'homme, et consulter les DDH à toutes les étapes de ce processus. Cette législation devrait imposer aux acteurs économiques la participation à une consultation continue, sûre et efficace avec les DDH et les autres détenteurs de droits potentiellement ou directement affectés. Cette législation devrait faire partie intégrante des plans d'atténuation et d'adaptation au changement climatique, et devrait concorder avec les orientations du Groupe de Travail des Nations Unies relatif aux Défenseurs et d’autres normes clés mentionnées ci-dessus (recommandations plus détaillées disponibles ici).
- Collecter et rendre compte des données sur les attaques létales et non létales afin d’informer des mécanismes de protection plus efficaces, et adopter une législation anti poursuite-bâillon pour empêcher les entreprises de réduire au silence les DDH (recommandations plus détaillées disponibles ici).
- Garantir une réparation efficace en cas de violations, notamment en renforçant les systèmes judiciaires pour mettre fin à l'impunité et en tenant les entreprises responsables des actes de représailles contre les DDH, et en participant activement à l'enquête et aux poursuites contre les responsables des attaques.
- Participer activement et de manière constructive aux négociations pour l'adoption d'un traité contraignant des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l'homme et veiller à ce qu'il reconnaisse explicitement les risques auxquels sont confrontés les DDH et leur droit à défendre les droits de l'homme.
Entreprises
Entreprises
Pour les entreprises :
- Adopter et mettre en œuvre des engagements de politique publique qui reconnaissent le rôle précieux des DDH, qui font référence aux risques spécifiques pour les DDH, qui assurent un engagement et une consultation efficaces avec les DDH à toutes les étapes du processus de diligence raisonnable, et qui s'engagent à une tolérance zéro pour les représailles dans l'ensemble des opérations, des chaînes d'approvisionnement et des relations commerciales de l'entreprise.
- Accompagner les engagements politiques de directives et de plans de mise en œuvre, conformément aux orientations du Groupe de Travail des Nations Unies sur les Entreprises et les Droits de l'Homme, et aux conseils de la société civile sur les indicateurs appropriés pour faire le suivi des progrès.
- S'engager dans une diligence raisonnable en matière de droits de l'homme et d'environnement, et rendre compte des résultats, en intégrant une perspective de genre tout au long du processus et en assurant un accès effectif à des recours pour les personnes lésées par l'activité de l'entreprise, conformément aux PDNU, aux orientations du Groupe de Travail des Nations Unies sur la garantie du respect des DDH et aux orientations du Groupe de travail des Nations Unies sur le Genre.
- Reconnaître que les défenseurs autochtones sont exposés à des risques disproportionnés, formuler et mettre en œuvre des engagements publics à respecter les droits des Peuples autochtones, fondés sur leurs droits à l'autodétermination (terres, territoires et ressources) et au consentement libre, préalable et éclairé (CLPE), y compris leur droit de définir le processus par lequel le CLPE est obtenu et de refuser leur consentement (recommandations plus détaillées disponibles ici).
- S'engager publiquement à remédier aux impacts négatifs sur les DDH qu'elle a causés ou auxquels elle a contribué et à collaborer avec les fournisseurs pour remédier aux impacts négatifs directement liés à ses opérations, ses produits et ses services. Cela comprend la mise en place et le financement adéquat de mécanismes de traitement des plaintes et de responsabilité alignés sur les PDNU, sûrs, efficaces et accessibles, qui incluent des protections pour les DDH et les lanceurs d'alerte, traitent les plaintes de tiers et assurent un suivi rigoureux pour traiter les plaintes et obtenir réparation.
- Reconnaître publiquement que les DDH ont la liberté de défendre les droits de l'homme et sont des alliés essentiels pour aider les entreprises à respecter leurs responsabilités en vertu des PDNU.
- S'abstenir de tout lobbying, de financement politique et d'autres formes directes ou indirectes d'engagement politique visant à soutenir les restrictions aux libertés civiques, ou à affaiblir les lois visant à tenir les entreprises responsables des violations des droits de l'homme et de la destruction de l'environnement.
Investisseurs
Investisseurs
Pour les investisseurs :
- Publier une politique en matière de droits de l'homme qui reconnaît le rôle précieux des DDH dans l'identification des risques associés aux activités commerciales et qui s'engage à une approche de tolérance zéro à l'égard des attaques contre eux. Communiquer clairement les attentes en matière de droits de l'homme consignées dans cette politique aux sociétés de portefeuille, y compris que les entreprises :
- Divulguent les risques liés aux droits de l'homme et à l'environnement ;
- S'engagent dans une consultation continue avec les communautés, les travailleurs et les DDH ;
- Aient des politiques et processus visant à respecter les droits des Peuples autochtones (y compris les droits à la terre et le consentement libre, préalable et éclairé) ;
- Respectent les droits des DDH ; et assurent un accès effectif aux recours en cas de préjudice.
- Entreprendre une diligence raisonnable rigoureuse en matière de droits de l'homme et d'environnement qui intègre une perspective de genre tout au long du processus et examiner les investissements potentiels pour toute implication passée dans des représailles. Cela implique de consulter les détenteurs de droits et ne pas se fier à l'auto-divulgation de l'entreprise quant au respect du droit des Peuples autochtones au consentement libre, préalable et éclairé.
- Éviter d'investir dans des entreprises ayant des antécédents de violations des droits de l'homme et de l'environnement et de représailles contre les DDH.
- Faire pression sur les sociétés bénéficiaires qui causent, contribuent ou sont directement liées à des atteintes aux droits de l'homme et à l'environnement, y compris les attaques contre les DDH, afin que l'entreprise atténue les impacts négatifs et donne accès à des recours aux personnes affectées.
Nous exprimons notre profonde gratitude aux défenseurs des droits de l’homme du monde entier qui dénoncent avec courage, s'organisent et agissent pour défendre les droits de l’homme et notre planète. Nous honorons et célébrons leur travail. Nous sommes également reconnaissants aux nombreuses organisations de la société civile, aux communautés et aux journalistes qui documentent le travail essentiel des défenseurs des droits de l’homme, soulevant des craintes concernant les préjudices causés par les entreprises et les attaques auxquelles ils sont confrontés, ainsi que toutes les personnes qui ont contribué à ce rapport et tous nos partenaires dans ce travail. Cette étude ne serait pas possible sans eux.
Auteurs principaux : Lady Nancy Zuluaga Jaramillo et Christen Dobson
Chercheurs : Ana Žbona, Lady Nancy Zuluaga Jaramillo, Hannah Matthews, Vitória Dell’Aringa Rocha, Dylan Lebecki, Christen Dobson, Vladyslava Kaplina, Ella Skybenko, Gerald Kankya, Anithra Varia, Andrea Maria Pelliconi, Valentina Muñoz, Claudia Ignacio Alvarez, Silvana Vanessa Mena Hernández, Alejandro Guzmán Woodroffe, Laura Perez Estevez, Leonor Gomes et Sonja Stara
Co-auteurs des études de cas : ALLIED, Asian NGO Coalition for Agrarian Reform and Rural Development (ANGOC), Bantay Kita, Cambodian Journalists Alliance Association (CamboJA), Fondo de Acción Urgente para América Latina y el Caribe, Global Rights Advocacy, Iniciativa Mesoamericana de Mujeres (IM-Defensoras), Indigenous Peoples Rights International (IPRI), Red Nacional de Defensoras en Honduras, Organización Fraternal Negra Hondureña (OFRANEH), TrendAsia, Urgent Action Fund for Feminist Activism, Zero Tolerance Initiative.
Le Centre de Ressources sur les Entreprises et les Droits de l’Homme est une ONG internationale qui recense les impacts sur les droits de l’homme de plus de 10 000 entreprises dans plus de 180 pays, mettant les informations à disposition sur notre site web en 10 langues. Le programme Civic Freedoms and Human Rights Defenders du Centre de Ressources s'attaque aux causes profondes des meurtres et de la violence contre les défenseurs des droits de l’homme et de l'environnement en lien avec les opérations des entreprises et aux chaînes d'approvisionnement mondiales ; plaide pour des pratiques respectueuses des droits et la responsabilité des acteurs économiques ; et renforce l'action rapide et l'implication à plus long terme des acteurs économiques en soutien aux défenseurs et aux libertés civiques afin de prévenir les attaques contre les défenseurs pour qu'ils puissent défendre en toute sécurité les droits de l’homme.